Supervision des coachs : le jeu de Go mondial
Bonjour,
Le modèle Britannique de supervision des coachs devient peu à peu celui qui le plus diffusé dans le monde. Il est soutenu par une très abondante littérature traduite dans de nombreuses langues et par les efforts des nombreuses écoles de superviseurs Anglaises pour s’étendre sur les cinq continents. Les universités ne sont pas en reste, en particulier celle d’Oxford-Brookes, ainsi que les « business schools » comme Ashridge.
L’articulation en trois fonctions, introduite en 2006 par Peter Hawkins à la suite de Brigid Proctor, est désormais bien assise et constitue un langage commun pour les superviseurs du monde entier (fonction « qualitative », fonction « development » et fonction « resourcing »). Cette articulation reste évolutive et ainsi Florence Lamy a imaginé une quatrième fonction qu’elle nomme « élévation ». L’idée est de distinguer la co-réflexion sur la partie purement technique de l’activité du supervisé de la co-réflexion sur les valeurs, le sens et la conscience de soi qui serait approfondie. En effet, de nouvelles approches, apparues depuis peu, permettent de travailler plus spécifiquement sur ces aspects.
Au niveau des outils, le plus généralement utilisé dans le monde est le modèle « 7eyed » de Peter Hawkins qui considère quatre niveaux d’analyse : l’intrapersonnel, l’interpersonnel, le contexte et le fantasme. Florence Lamy et moi-même avons effectué des ajouts ou modifications qui ont été montrés à Peter lors des colloques internationaux de superviseurs. D’autres modèles aussi complets comme par exemple le « Three Worlds Four Territories » n’ont pas réussi la même percée.
La Grande Bretagne, l’Amérique du Nord, l’Australie, le Moyen Orient et une partie de l’Asie s’accommodent du modèle Britannique de supervision des coachs. La Chine Mainland, l’Amérique du Sud et l’Afrique hésitent. En Europe continentale qui est composée de nombreux pays très différents, la situation est contrastée.
Il y a en effet à l’est du Rhin une association forte de 9000 superviseurs dans 24 pays, l’ANSE, dont l’activité de supervision dépasse la seule supervision du coaching. Elle promeut le référentiel de compétences de coaching et de supervision qui a été commandé par l’Union Européenne en 2011 et publié en 2015.
Dans sa forme, ce référentiel de 24 compétences applique les règles de l’EQF (*), de l’ECTS et de l’ECVET (**) et se prête bien à la mise en place locale de l’EQF, comme par exemple le RNCP en France.
Les 24 compétences sont articulées autour des interactions, des actes professionnels et de l’organisation. Ainsi, des éléments comme la culture d’entreprise (8), le conflit (8, 20), les rôles et statuts dans l’organisation (9), le leadership (10), la communication au sein des organisations (19), la conscience interculturelle (21) et le pouvoir (22) y sont présents. Comparé à ceux des autres grandes associations (EMCC, ICF et AC) ce référentiel couvre beaucoup mieux le champ du coaching, du mentoring et de la supervision.
L’applicabilité de ce référentiel a donné lieu à de vives discussions lors d’une réunion inter-associations en septembre 2015 à Vienne. Les USA (représentés par Magda Mook d’ICF) et les associations « de l’Ouest » (EMCC, ICF, AC, APECS et AOCS) sont favorables à un référentiel uniforme pour le coaching. Par contre, les positions sur la supervision sont variées. L’EMCC, qui est en pointe sur la supervision des coachs, reste depuis en contact étroit avec l’ANSE.
L’ANSE a une valeur centrale : la diversité, c’est-à-dire qu’elle reconnait le fait que les pays, les professions de l’aide (coach et superviseur en particulier), les associations et les organisations clientes ont des besoins très différents en raison de l’histoire et de la culture. En conséquence, chaque pays/entité pourrait puiser dans les 24 compétences pour construire son propre référentiel. D’ailleurs plusieurs grandes entreprises internationales l’ont déjà fait en complétant le référentiel de coaching de l’EMCC ou de l’ICF afin d’y ajouter des compétences sur le leadership et l’organisation.
L’avantage à terme de l’adoption généralisée du référentiel de l’ANSE serait la comparabilité entre les professions, les formations, les spécialités, etc… Il permettrait en particulier de rendre possible la discussion entre les associations, les organismes de formation privés, les universités et les Pouvoirs Publics sur la question de ce qu’est la supervision.
Belle journée